COP 21 : climat encore, avec l’accord de Paris

En 2015 Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères de François Hollande, a volé la vedette sur la scène internationale avec la signature de l’Accord de Paris, issu de la COP 21. Contrairement aux autres conférences annuelles sur le climat organisées sous l’égide de l’ONU, celle-ci a accouché d’un texte avec des objectifs chiffrés sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre.  Encore faut-il que les engagements des États signataires soient respectés, ce qui n’est pas toujours le cas. Mais au moins l’humanité a avancé d’un pas dans la lutte contre le réchauffement climatique, en apparence au moins.

Ma modeste participation dans cet effort écologique tient plus à mon engagement au sein de la gauche anticapitaliste qu’à mon travail d’interprète. Il n’empêche, j’ai pu mettre mes talents linguistiques au service de cette rencontre internationale à Paris. Contrairement à certains de mes collègues qui se sont rendus dans les salles de conférences hyper sécurisées pour l’occasion, habillés comme les dignitaires étrangers pour qui ils interprétaient, j’ai arboré mes badges politiques dans une tenue décontractée à l’intérieur d’une salle de classe dans un établissement scolaire de banlieue, puis dans une salle municipale du 19ème arrondissement de Paris. Car ce n’était pas la conférence « officielle » mais la conférence « off » (alternative) organisée par des associations écologistes, pendant que les chefs d’États, les chefs de gouvernement, les ambassadeurs et leurs équipes techniques respectives étaient reçus dans les lieux plus prestigieux par le ministre français de l’Environnement, par le Premier ministre et par le Président de la République. À Montreuil, une banlieue populaire dont le maire est membre du Parti communiste et celle qui l’a précédé dans cette fonction est membre d’Europe Écologie Les Verts, c’était le Festival Alternatiba qui a retenu mes services. À Paris 19ème, j’étais engagé pour une deuxième série de conférences « off » par la Rosa Luxemburg Stiftung, une fondation allemande dont le nom indique sans équivoque son orientation marxiste.

Au final l’habillement n’a pas changé grand-chose car même tiré à quatre épingles, il fallait montrer pattes blanches pour entrer dans les salles de conférences « officielles ». On a rarement vu un tel niveau de sécurité. D’habitude il suffit de préciser au vigil à l’entrée qu’on est un des interprètes et tout le monde nous déroule le tapis rouge, sachant que notre apport est indispensable pour le succès de la conférence. Cette fois-ci c’est tout juste si on n’était pas traité comme des terroristes suspectés, fichés « S », avec présentation de références, de carte d’identité, de lettres de créances et d’autres autorisations écrites avant de pouvoir pénétrer dans le saint des saints pour la COP 21.

Ce n’est pas tout ! Les « valises » de certains de mes collègues étaient inspectées avec minutie par des gardiens de sécurités zélés. Les valises en question n’étaient pas des bagages comme on en trouve à l’aéroport pour les voyageurs qui partent en vacances. Il s’agit de valises techniques contenant des casques, un micro sans fil et un chargeur pour assurer l’interprétariat simultané dans des ateliers et groupes de travail restreints en marge des assemblées plénières de la COP 21. Les vérifications de sécurité ont duré plus de temps que l’habituel passage d’un vacancier au détecteur de métal à l’aéroport. Dernier élément mais non des moindres, il y a un certain nombre d’entreprises spécialisées en région parisienne qui font la location de cet équipement, surtout auprès des agences de traduction. Sauf qu’avec cette rencontre internationale surdimensionnée, bon nombre de ces fournisseurs étaient en rupture de stock et il fallait se débrouiller pour trouver l’équipement nécessaire. C’est ainsi que l’interprétariat simultané aux conférences « off » a failli être compromis. On a fini par trouver l’équipement qui nous manquait, surtout chez un certain nombre d’interprètes qui possèdent leur propre équipement, ce qui n’est pas le cas de la plupart de mes collègues. Mais tout est bien qui fini bien et on a enfin pu assurer le bon déroulement de ces conférences avec un matériel hétéroclite, repêché chez les uns et les autres avec les moyens du bord.

Comme disent les écologistes conséquents, il faut changer le système, pas le climat. Quant aux accessoires indispensables (équipement d’interprétariat pour une telle rencontre internationale) et aux accessoires frivoles (l’habillement selon que l’on traduit pour des militants écologistes ou pour des chefs d’État), les obstacles étaient moins contraignants que les engagements gouvernementaux pour la réduction des émissions polluantes. On a su surmonter les obstacles qui se dressaient sur le chemin des interprètes avec les moyens que sont les nôtres. À l’heure actuelle d’autres défis nous attendent. Car surmonter les obstacles érigés par des climato-sceptiques comme Donald Trump (USA), Jair Bolsanaro (Brésil) et d’autres grands pollueurs de ce monde, c’est une toute autre affaire.

(suite avec le prochain article)

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